Значительное место авторы предисловия уделяют влиянию российской революции 1917 г. на Матьеза и эволюции его отношения к сталинскому режиму и советской науке. Неоспоримая заслуга авторов – анализ оригинального подхода Матьеза к революции 1917 г., которую он рассматривал прежде всего как аграрную, что, по их мнению, и побудило его после установления советской власти приветствовать аграрные начинания большевиков и в 1920 г. провести аналогию между ними и якобинцами[374].
По словам авторов, отсутствие народного суверенитета и демократии в Советской России Матьез первоначально объяснял временно сложившейся ситуацией Гражданской войны и надеялся, что таковые утвердятся после установления внутренного мира. При этом Матьеза серьезно тревожила бюрократизация Советов, оказавшихся под полным контролем правящей партии большевиков[375]. «На самом деле, – заключают авторы, – Альбер Матьез никогда не поддерживал диктатуры, вне зависимости от того, кем она осуществлялась – единственной партией, находящейся у власти, или верховным руководителем»[376]. Выход Матьеза из ФКП авторы объясняют его глубокой уверенностью в том, что гражданам страны Советов присущ «рабский» менталитет, сложившийся в результате диктаторских устремлений партии большевиков, и нежеланием содействовать подобному нарушению суверенитета народа[377].
Крах дружественных отношений Матьеза с советскими историками Боск и Готье связывают с поддержкой, оказанной им арестованному Тарле. Отношение советской власти к этому выдающемуся историку стало, по мнению Матьеза, одним из ярких проявлений сути сталинизма[378]. Однако, касаясь ситуации в советской науке того времени, авторы предисловия из-за незнания русского языка ограничиваются пересказом фактов, приведенных в книге Т. Кондратьевой. Напротив, анализ специфического отношения Матьеза к марксизму – одна из сильных сторон исследования Боска и Готье: «Не отклоняя марксистский метод, Матьез отвергал его догматические искревления»[379], – пишут они.
В заключение отметим, что авторы предисловия в целом заполнили одно из белых пятен французской историографии, предприняв в меру своих возможностей первый во Франции опыт обсуждения полемики Матьеза с советскими историками, вызывающей и в наши дни неугасающий интерес.
Глава IV
Sur la polémique entre albert mathiez et les historiens soviétiques[380]
[К вопросу о полемике Альбера Матьеза с советскими историками]
Albert Mathiez (1874–1932), grand historien français, fondateur de la Société des études robespierristes et des
Or, en dépit de ces circonstances, le chemin parcouru par Mathiez a été très épineux. Dans la mémoire de ses contemporains, il appara’t comme un homme de principe, indépendant, tenace et intransigeant, doté d’une mentalité originale et d’un caractère irascible et imprévisible. Ce n’est certainement pas par hasard que quelques-uns de ses confrères et de ses élèves l’ont qualifié d’un «paysan du Danube»[385]. Il me semble intéressant de me référer à ce propos au témoignage de Louis Gattschakl, son collègue américain: «J’ai fini par me rendre compte qu’il y avait deux Mathiez. L’un était le gentleman bienveillant qui prenait plaisir à une agréable conversation et à la bonne chère et qui se donnait une peine infinie pour Ktre utile aux gens qui avaient besoin d’aide. L’autre était l’érudit vigoureux, véhément, incapable de tolérer une sottise ou ce qu’il regardait comme sottise»[386]. Autrement dit, Claudine Hérody-Pierre avait certainement raison de l’avoir qualifié d’un «professeur autant ha* que vénéré»[387]. Aussi, ce n’est pas étonnant que sa vie ait été semée d’embûches car sa personnalité extraordinaire irritait toutes les médiocrités qui se trouvaient dans son entourage. On ne l’invita à la Sorbonne qu’en 1926, après le départ de Philippe Sagnac pour l’/gypte.
/prouvant de sincères sympathies pour les idées socialistes, Mathiez accepta avec joie la Révolution de Février en Russie, et la Société des études robespierristes salua «avec enthousiasme la victoire de la Douma russe contre le despotisme»[388]. Il approuva aussi la Révolution d’Octobre et adhéra en 1920 au Parti communiste français. Dans ces conditions, Mathiez fit beaucoup pour établir des relations amicales avec ses coll è-gues soviétiques, y compris les grands historiens russes non marxistes comme Eugène Tarlé et Nikola* Kareiev[389]. Il faut absolument noter que Mathiez n’était pas une exception dans ce domaine, et s’inscrivait dans une longue tradition. Mentionnons les noms de ses collègues français, tels Gabriel Monod et Henri Sée, qui avant et après lui, s’adressaient constamment à Kareiev en lui demandant de collaborer aux éditions scientifiques françaises. La lettre de Monod du 4 février 1907 est caractéristique: «Je viens vous demander si vous ne conna’triez pas un jeune professeur russe, sachant très bien le français, qui pourrait nous fournir tous les deux ans un Bulletin historique
Quant au profond respect de Mathiez envers Kareiev, qu’il caractérisait d’un «doyen des historiens russes […] qui a consacré sa longue et belle vie à l’étude de notre XVIIIe siècle et notre Révolution»[393], on peut en juger d’après la lettre de Gustave Laurent, directeur des
Aprns la révolution de 1917 Mathiez a été l’initiateur d’une très fructueuse coopération avec les historiens marxistes soviétiques, comme Nikola «Loukine, Grigori Friedland et d’autres, dont il avait fat h connaissance personnelle dans les années vingt lors des missions scientifiques de ces derniers en France. Certes, il avait le grand mérite de continuer les bonnes traditions des acquis de la science historique en Russie dans le domaine des études révolutionnaires. Mais, dans ce cas, il s’agissait principalement de la science historique marxiste, et il a atteint des résultats évidents et indéniables en invitant Kareiev, Loukine et d’autres à collaborer aux
Les historiens soviétiques, à leur tour, ont été intéressés à améliorer leurs relations avec leurs collègues français, surtout avec ceux de gauche, dont Mathiez était le représentant le plus éminent. Du côté soviétique, les mérites de Tarlé sont évidents dans l’approfondissement des relations amicales entre les historiens des deux pays. Sa correspondance de cette époque prouve l’attitude aimable des historiens français à son égard et celui des autres historiens soviétiques. Dans son compte rendu sur l’une de ses missions scientifiques en France, il écrivait le 4 décembre 1924:
«L’attitude générale du monde scientifique envers les savants qui arrivent de la Russie Soviétique est au plus haut point prévenante et bienveillante. Cette attitude est surtout évidente de la part des représentants du côté gauche de l’historiographie française: il me faut mentionner les noms d’Aulard, de Mathiez et, enfin, celui de l’éminent Georges Renard, qui occupe maintenant la chaire d’histoire du travail au Collè ge de France, ancien communard de l’époque de la Commune de Paris de 1871 (il a maintenant 76 ans)»[397].
Il avait souligné ce шкше fait dans sa lettre datée du 31 août 1924 à Olga Tarlé, sa femme: «En somme, les savants franç ais m’accueillent ici parfaitement»[398].
Tarlé se trouvait en trns bons termes avec les historiens français. En tant que l’un des co-rédacteurs, avec Fédor Ouspenski, des
«Nous nous occupons, en ce moment, d’organiser le tableau des cours de notre année scolaire. Et conformément à la tradition de notre Collège, qui a toujours consisté à faire appel à des collaborations étrangères, nous vous serions très reconnaissants, de nous accorder votre précieuse collaboration. Puis-je vous prier de nous faire conna’ tre si nous pourrions y compter? [402]
Deux jours après, il poursuivait: «Je suis bien content d’apprendre que vous allez donner un enseignement au Collège Libre des Sciences Sociales, dont je suis vice-président. Ce sera pour nos étudiants et pour notre public un régal et un profit. Votre séjour à Paris me sera personnellement bien précieux et agréable»[403].
En шкше temps, Tarlé avait noué des relations trns amicales avec Mathiez. Dans ses lettres adressées à sa femme, il parlait constamment de ses rencontres avec lui lors de ses différentes missions scientifiques à Paris, et il qualifiait les
Comme Tarlé estimait beaucoup non seulement Mathiez, mais aussi Aulard[407], «figure centrale de toute l’historiographie de la Grande révolution»[408], il avait entrepris en 1924 des démarches pour les réconcilier[409]; et il lui semblait qu’il y avait réussi, mais, hélas, il se trompait. Ce fut aprns la fondation au mois de mars 1924 de la